4 février 2015
On estime que 1,3 million de personnes ont été sans toit, au Canada, au cours des cinq dernières années. La nuit, dans les rues du pays, 235 000 personnes dorment à la belle étoile, et un nombre encore plus important est touché par des enjeux de logement inadéquat ou instable. Malgré ces chiffres exorbitants, le Canada n’est pas doté d’une stratégie nationale en matière de logement — le seul pays du G8 qui n’en a pas.
En novembre 2014, nous avons publié un article de blogue en deux parties (partie 1, partie 2) sur les fondements de notre intervention dans l’affaire Tanudjaja c. Canada pour le droit au logement, en coalition avec l’ARCH Disability Law Clinic, la HIV/AIDS Legal Clinic Ontario (HALCO) et Dream Team. Cette contestation phare devant la Cour supérieure de l’Ontario allègue que les gouvernements provincial et fédéral ont échoué à mettre en œuvre des stratégies efficaces pour réduire et éliminer l’itinérance. Nous soutenons que des conditions de logement inadéquates portent atteinte aux droits à l’égalité, à la vie, à la liberté et à la sécurité de la personne, garantis par la Charte canadienne des droits et libertés. Les gouvernements ont présenté une motion de non-lieu, qui a été acceptée et a fait avorter l’affaire sans même que des preuves soient déposées. Les décideurs ont porté en appel la décision favorable à la motion de non-lieu. Malheureusement, la Cour a rejeté l’appel le 1er décembre 2014 — coïncidant tristement avec la Journée mondiale du sida.
Mais il reste une lueur d’espoir dans cette affaire. La décision divisée ayant été rendue par un panel de trois juges, la voix dissidente laisse une possible ouverture à un appel devant la Cour suprême. Selon la majorité, l’affaire soulevait des questions politiques, et non juridiques, qui allaient « bien au delà des limites de la capacité institutionnelle de la Cour » — un point de vue que des avocats pour personnes sans abri trouvent « profondément perturbant », tel que rapporté dans le Toronto Star. Toutefois, la juge Kathryn Feldman a exprimé une opinion dissidente reconnaissant les implications importantes de l’affaire dans le contexte de la Charte. Selon elle, l’affaire mettait en relief des « obstacles considérables à l’accès à la justice », et une cour est l’endroit précis où ces questions fondamentales de droits devraient être abordées.
À l’instar des autres organismes intervenus dans l’affaire Tanudjaja, le Réseau juridique considère que le logement est un droit de la personne. Le logement et la santé sont étroitement liés, comme le démontre le fait que la population itinérante est touchée par des taux d’infection à VIH plus élevés que la communauté générale. Les personnes vivant avec le VIH ont également plus de difficulté à se trouver un logement, en raison de la stigmatisation et de la discrimination liées au VIH. En revanche, lorsque des personnes vivant avec le VIH ont une alimentation et un logement stables, les chances de succès de leur traitement sont doublées.
Nous espérons sincèrement que cette importante affaire sera portée en appel devant la Cour suprême, et nous demeurons engagés à appuyer sa promesse d’un droit équitable au logement pour tous.