Communiqué : Le Gouvernement du Canada trahit sa promesse de mettre fin à la criminalisation excessive des personnes vivant avec le VIH

Les personnes vivant avec le VIH au Canada restent sous la menace d’une criminalisation continue. Colère et déception devant l’abandon des efforts de réforme du droit par le gouvernement canadien.

(OTTAWA, Ontario) 28 novembre 2024 – À l’approche de la Journée mondiale du sida, 1er décembre, et des élections fédérales de 2025, le Gouvernement du Canada a communiqué à la Coalition canadienne pour réformer la criminalisation du VIH (CCRCV) sa décision d’abandonner tout projet de réforme législative concernant la criminalisation du VIH. Les personnes vivant avec le VIH sont laissées sans explication, sachant seulement que leurs droits sont mis de côté une fois de plus.

Un moment critique

Cette décision ne pourrait pas tomber à un pire moment. Le Canada se classe actuellement dernier parmi les pays du G7 en ce qui concerne la réduction des nouvelles infections à VIH. Le nombre de cas déclarés est en hausse constante au Canada depuis 2020, nous éloignant de plus en plus de nos objectifs. La criminalisation du VIH et la stigmatisation qui en résulte contribuent à cette tendance alarmante, en plus de placer le Canada en contradiction avec la science et hors du consensus mondial sur la meilleure façon de réduire la transmission du VIH et de respecter les droits et la dignité des personnes vivant avec le VIH. L’ONUSIDA a souligné dans son communiqué de presse, le 26 novembre dernier, que « [l]a criminalisation et la stigmatisation des communautés marginalisées entravent l’accès aux services de lutte contre le VIH qui peuvent sauver des vies ».

La situation actuelle

Actuellement, les personnes vivant avec le VIH au Canada sont passibles de poursuites pénales en vertu des lois sur les agressions sexuelles, entraînant des condamnations, l’emprisonnement et l’inscription au registre des délinquants sexuels même dans des cas où le risque de transmission est faible ou nul. Des expert-es juridiques et de la médecine, aux quatre coins du monde, s’accordent pour dire que cela ne correspond pas aux connaissances scientifiques d’aujourd’hui sur la transmission et peut dissuader des personnes de se faire dépister et d’accéder aux traitements et à du soutien. Au Canada, il est bien documenté que les préjudices de la criminalisation du VIH sont vécus de manière unique, disproportionnée et souvent insidieuse par les personnes noires et les autochtones.

Un appel à l’action

« Nous en avons assez de voir la vie des personnes vivant avec le VIH servir à des jeux politiques! », déclare Alex McClelland, de la CCRVC. « Les belles intentions et les plans d’action mis au rancart ne changent pas la réalité de la vie pour les personnes au Canada que l’on persécute en raison de leur état de santé. La réforme du droit exige un effort concret, un véritable engagement et une volonté politique de faire ce qui est juste. Malheureusement, le gouvernement canadien semble mettre de côté les personnes vivant avec le VIH au profit d’un calcul politique en vue d’une élection. »

Un historique d’engagements non respectés

Des membres de la CCRCV travaillent avec le gouvernement fédéral actuel pour réformer la criminalisation du VIH depuis son élection en 2015. La CCRCV espérait que le changement ne tarde plus, après les consultations nationales lancées par le gouvernement en décembre 2022. Ces consultations faisaient suite à de nombreuses reconnaissances, par le gouvernement, que le statu quo est néfaste :

  • En 2016, la ministre de la Justice du Canada a reconnu pour la première fois que la criminalisation de la non-divulgation du VIH au pays est excessive.
  • En 2018, la ministre a mis en œuvre une directive visant à limiter les accusations liées à la non-divulgation du VIH, de la part des instances fédérales (ce qui se limite aux trois territoires), mettant fin à l’utilisation des lois sur les agressions sexuelles dans ce contexte. Cette recommandation a été réitérée dans un rapport gouvernemental de 2019 à l’issue de sa propre étude de la criminalisation du VIH.
  • En 2022, le Canada a lancé un Plan d’action fédéral 2ELGBTQI+ promettant de tenir des consultations sur la réforme du Code criminel. Ces consultations, annoncées sur la scène mondiale à la veille du Congrès international sur le sida de 2023, se sont conclues en janvier 2023. Le rapport des consultations a réaffirmé que le recours aux lois sur l’agression sexuelle était inapproprié.
  • Puis le premier ministre du Canada, Justin Trudeau, a réitéré dans sa déclaration à l’occasion de la Journée mondiale du sida de l’an dernier : « Le droit pénal actuel en ce qui a trait à la non-divulgation réprime trop durement les personnes vivant avec le VIH et le sida et les stigmatise, ce qui les décourage de se faire soigner et dépister.»

Des membres de la CCRVC ont rencontré le ministre de la Justice à plusieurs reprises après la fin des consultations (début 2023) et se sont vu promettre des mesures de réforme concrètes. À ce jour, le Gouvernement du Canada n’a toujours pas informé publiquement les personnes vivant avec le VIH des raisons pour lesquelles les promesses qu’on leur a faites ne seront pas tenues, et des raisons pour lesquelles il abandonne la voie de la réforme du droit.

Un nouvel appel à l’action

En cette Journée mondiale du sida, la CCRCV appelle une fois de plus le gouvernement fédéral à démontrer sa bonne foi, à faire preuve de leadership et à agir concrètement pour mettre fin à la criminalisation excessive des personnes vivant avec le VIH dans ce pays. La communauté mène depuis longtemps cette bataille, et ce qui manque aujourd’hui est la volonté du gouvernement d’adopter une réforme en accord avec les droits humains et le consensus scientifique. La Coalition canadienne pour réformer la criminalisation du VIH reste engagée en faveur de ce changement qui est dû depuis longtemps – et le pouvoir de la voix collective de la communauté ne sera pas réduit au silence.

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La Coalition canadienne pour réformer la criminalisation du VIH est une coalition nationale de personnes vivant avec le VIH, d’organismes communautaires, d’avocat-es, de chercheur(-euse)s et d’autres intéressé-es. Elle a été formée en octobre 2016. Pour en savoir plus, cliquez ici.

La Déclaration de consensus communautaire 2022, qui décrit en détail les demandes de la communauté pour réformer le droit et les politiques, après des consultations, est en ligne ici.

Contacts pour les médias :

Dylan DeMarsh
Digital and Strategic Communications Officer – HIV Legal Network
d.dmarsh@hivlegalnetwork.ca