DÉCLARATION AUX MÉDIAS : LE RÉSEAU JURIDIQUE VIH ET LA HALCO DÉPLORENT LE JUGEMENT DE LA COUR SUPRÊME DANS R. v. SHARMA

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LE RÉSEAU JURIDIQUE VIH ET LA HALCO DÉPLORENT LE JUGEMENT DE LA COUR SUPRÊME DANS R. v. SHARMA

4 novembre 2022, Toronto (ON) – La Cour suprême du Canada a rendu aujourd’hui sa décision dans l’affaire R. c. Sharma, qui porte sur la constitutionnalité des dispositions du Code criminel qui rendent les peines d’emprisonnement avec sursis (parfois appelées « détention à domicile » ou « assignation à résidence ») inaccessibles dans le cas de certaines infractions. Mme Sharma, une femme autochtone reconnue coupable d’un délit de trafic de drogue, soutenait que ces dispositions violaient ses droits à la liberté et à l’égalité garantis par la Charte. Une majorité de 5-4 de la Cour a conclu que les restrictions relatives à la peine d’emprisonnement avec sursis étaient constitutionnelles. Nous sommes déçu-es par cette décision, car elle maintient l’imposition trop large de peines d’emprisonnement pour les comportements criminels les moins graves et crée de nouveaux obstacles à l’application des droits à l’égalité.

Le Réseau juridique VIH et la HALCO sont intervenus conjointement auprès de la Cour d’appel de l’Ontario et de la Cour suprême du Canada. Nous l’avons fait pour mettre en évidence la façon dont les restrictions de la peine d’emprisonnement avec sursis portent atteinte aux droits humains des personnes vivant avec le VIH lorsqu’elles sont déclarées coupables d’agression sexuelle grave. Au Canada, les personnes vivant avec le VIH peuvent encore être accusées et poursuivies, et sont condamnées de manière disproportionnée, si elles n’ont pas divulgué leur séropositivité à un-e partenaire sexuel-le, même lorsqu’il n’y avait aucune possibilité réaliste de transmission et qu’en fait aucune transmission n’a eu lieu. Les restrictions relatives à la condamnation avec sursis examinées dans l’affaire Sharma s’appliquent également à l’agression sexuelle grave, car celle-ci est passible d’une peine maximale d’emprisonnement à vie – ce qui signifie qu’une condamnation avec sursis reste inaccessible aux personnes déclarées coupables d’agression sexuelle grave pour non-divulgation du VIH.

Dans leur intervention, le Réseau juridique VIH et la HALCO ont examiné la jurisprudence relative à la non-divulgation du VIH afin de montrer que les restrictions de la peine d’emprisonnement avec sursis ratissent trop large. Bon nombre des infractions qui déclenchent l’interdiction d’un emprisonnement avec sursis concernent des comportements associés à une certaine échelle de gravité. Nous avons fait valoir que la loi est trop large lorsqu’elle est appliquée aux cas de non-divulgation du VIH, en particulier lorsque celui-ci n’a pas été transmis, que la personne n’avait pas l’intention de le transmettre et/ou que le risque de transmission était nul ou négligeable. L’effet de cette application excessive de la loi est l’augmentation des peines de prison pour les infractions les moins graves de non-divulgation du VIH.

De plus, nous savons que les personnes autochtones, noires et 2SLGBTQ+ sont affectées de manière disproportionnée par la criminalisation de la non-divulgation du VIH. La décision de la majorité de la Cour rendra plus difficile à un-e juge de déterminer une peine adaptée à une personne en tenant compte des circonstances de l’infraction, des préjugés systémiques et des circonstances de vie difficiles.

La criminalisation des personnes vivant avec le VIH au Canada est un problème persistant et urgent; le Canada a tristement toujours été un leader mondial dans ce type de poursuites. En fait, plus de 100 organismes à travers le Canada ont maintenant signé la deuxième Déclaration de consensus communautaire appelant à une réforme de la loi du pays. Le Gouvernement du Canada a lui-même reconnu que « la criminalisation excessive des cas de non-divulgation du VIH décourage plusieurs personnes d’effectuer un test de dépistage et de demander des traitements, et peut stigmatiser davantage les personnes vivant avec le VIH ou le sida » – et il vient de lancer une consultation virtuelle ouverte sur cet enjeu urgent. En outre, la Commission de vérité et réconciliation du Canada a demandé au gouvernement fédéral de modifier le Code criminel afin de permettre aux juges de déroger aux restrictions relatives à l’utilisation des peines avec sursis.

Robin Nobleman, avocate qui a représenté le Réseau juridique VIH et la HALCO, note que « la décision d’aujourd’hui rend d’autant plus urgente la réforme du droit sur la question de la non-divulgation du VIH, afin de remédier à la fois à la criminalisation des personnes vivant avec le VIH et à la surincarcération des Autochtones, des Noir-es et d’autres membres de communautés marginalisées ».

Sandra Ka Hon Chu, codirectrice générale du Réseau juridique VIH, ajoute : « Il est maintenant encore plus urgent que le Parlement adopte le Projet de loi C-5, qui abrogerait les dispositions contestées dans cette affaire et permettrait une utilisation plus juste et plus appropriée des peines avec sursis. Sinon, nous continuerons de perpétuer la honteuse réalité de la surincarcération flagrante des Noir-es, des Autochtones et des personnes qui utilisent des drogues ».

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À propos du Réseau juridique VIH

Le Réseau juridique VIH (www.reseaujuridiquevih.ca), anciennement le Réseau juridique canadien VIH/sida, fait valoir les droits humains des personnes vivant avec le VIH ou le sida, affectées par ceux-ci ou à risque; il le fait grâce à des recherches et analyses, des actions en contentieux et d’autres formes de plaidoyer, d’éducation du public et de mobilisation communautaire.

À propos de la HALCO

La HIV & AIDS Legal Clinic Ontario (HALCO) (www.halco.org) est une clinique juridique communautaire qui offre des services juridiques gratuits aux personnes vivant avec le VIH ou le sida en Ontario.

Contacts pour les médias :

Sandra Ka Hon Chu, codirectrice générale du Réseau juridique VIH

schu@hivlegalnetwork.ca

Robin Nobleman, avocate employée de la HALCO

(416) 340-7790 (poste 4043)

robin.nobleman@halco.clcj.ca