COMMUNIQUÉ DE PRESSE : LE PROGRAMME D’ÉCHANGE DE SERINGUES EN PRISON

 

MANQUEMENT À LA SANTÉ PUBLIQUE :
UN EX-DÉTENU ET DES ORGANISMES VIH POURSUIVENT EN COUR LE GOUVERNEMENT DU CANADA POUR SON DÉFAUT DE FOURNIR L’ACCÈS À UN PROGRAMME EFFICACE DE SERINGUES EN PRISON

 

La présente déclaration est du Réseau juridique canadien VIH/sida. Les commentaires extraits de la présente peuvent être attribués à Sandra Ka Hon Chu, directrice de la recherche et du plaidoyer.

 

9 décembre 2019 – Aujourd’hui à Toronto se tiendra une audience de tribunal concernant le « programme d’échange de seringues en prison » (PÉSP) du Canada. Le Réseau juridique canadien VIH/sida, un ex-détenu et trois autres organismes du domaine du VIH poursuivent le gouvernement fédéral pour son défaut de fournir aux détenu-es un accès facile, confidentiel et efficace à des programmes de seringues.

Depuis plus de 25 ans, des programmes de seringues sont offerts dans des systèmes de prisons d’autres pays. Les examens de programmes existants ont démontré qu’ils :

  • réduisent le partage de seringues et le risque d’infection par le VIH et par le virus de l’hépatite C (VHC);
  • ne causent pas d’augmentation de la consommation ou de l’injection de drogues;
  • réduisent le nombre de surdoses et d’autres préjudices pour la santé des détenu-es;
  • facilitent l’orientation de leurs utilisateur(-trice)s vers des programmes de traitement de la toxicomanie; et
  • n’ont pas donné lieu à des incidents d’utilisation d’aiguilles comme armes contre des employé-es de prison ou des codétenu-es.

En raison de la rareté du matériel d’injection stérile en prison, les personnes qui s’y injectent des drogues sont plus susceptibles que les personnes de l’extérieur de partager et de réutiliser du matériel d’injection. Ceci augmente considérablement leur risque de contacter le VIH et le VHC en prison – des infections qu’elles rapporteront dans leur communauté lors de leur remise en liberté. Un programme de seringues protège la santé et la vie de tous les Canadiens et toutes les Canadiennes. Simplement dit, la santé en prison, c’est la santé publique.

Poussé à agir par notre action en justice initiée en 2012, le Gouvernement du Canada a amorcé en 2018 la mise en œuvre d’un PÉSP, mais celui-ci comporte des lacunes fondamentales qui portent atteinte de plusieurs façons à la confidentialité des détenu-es et qui font en sorte qu’il n’a pas leur confiance. Aucun programme, dans aucune prison du monde, n’utilise cette approche qui pose un obstacle majeur à l’accès. Par ailleurs, le PÉSP n’est offert que dans quelques prisons, en plus d’être vulnérable à une annulation. Alors que la plupart des principaux partis politiques ont exprimé leur appui à un PÉSP, le Parti conservateur du Canada s’est engagé à annuler le programme s’il est élu. Le Service correctionnel du Canada possède également un historique d’annulation de mesures efficaces de réduction des méfaits pour les détenu-es, ou de défaut de les fournir. Par conséquent, nous avons besoin d’une décision positive de la cour pour que le droit à ce programme de santé fondé sur les données soit enchâssé dans la loi.

Le Syndicat des agents correctionnels du Canada est opposé au PÉSP et fait pression pour son remplacement par des sites de consommation supervisée en prison pour que les détenu-es aient accès au matériel stérile uniquement dans des lieux approuvés. Le syndicat a laissé entendre qu’il existe de tels sites de prévention des surdoses dans des prisons d’autres pays comme la France. Cette affirmation est tout simplement fausse; il n’existe de tels sites dans aucune prison, ni dans celles de la France comme l’ont confirmé les autorités françaises. L’offre d’un plus grand nombre d’options de réduction des méfaits est importante, mais un site de consommation supervisée ne peut pas remplacer un programme efficace de seringues et d’aiguilles en prison. Pour que des détenu-es utilisent un site de consommation supervisée en prison, il faut qu’ils/elles puissent y accéder de façon confidentielle, sans exposer leur consommation de drogues à d’autres détenu-es et au personnel – car c’est une activité fortement stigmatisée et criminalisée. En outre, il est difficile d’imaginer la logistique nécessaire à protéger la confidentialité des utilisateur(-trice)s dans le contexte d’un site d’injection supervisée en prison, alors qu’un programme efficace d’échange de seringues en prison peut être confidentiel et que ce modèle fonctionne déjà dans d’autres prisons.

Le droit des détenu-es d’obtenir la même norme de soins de santé que celle offerte dans la communauté est clairement établi dans les lois sur les droits de la personne. Nous soutiendrons en cour aujourd’hui que les détenu-es ont le droit constitutionnel à des soins de santé essentiels qui incluent un programme efficace de seringues en prison, même si les avocats du gouvernement continuent de semer le doute quant à ses bienfaits (que le Gouvernement du Canada a lui-même reconnus publiquement). Nous contesterons également le refus du gouvernement d’apporter des changements fondamentaux au PÉSP d’après les abondantes données sur ce qui est nécessaire à la réussite de sa conception et de sa mise en œuvre.

Pour respecter son obligation légale de protéger la santé des personnes incarcérées, le gouvernement doit rectifier son PÉSP actuel, notamment en assurant que les détenu-es aient un accès facile, confidentiel et efficace à du matériel d’injection stérile et en mettant le programme en œuvre dans toutes les prisons.

 

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Avis :  

L’audience est prévue le 9 décembre 2019 et se tiendra au :

Osgoode Hall, 130 Queen Street West, Courtroom No. 5, Toronto, Ontario

Heure du début : 10 h

Un rassemblement public et une démonstration d’appui à la réduction des méfaits en prison se tiendront à 9 h, à l’extérieur du palais de justice.

Les journalistes et les membres du public sont les bienvenus.

 

Pour plus d’information

Cliquez ici pour un document de politiques et un feuillet d’information qui déboulonne certains mythes courants au sujet des programmes de seringues en prison.

 

Au sujet du Réseau juridique canadien VIH/sida

Le Réseau juridique canadien VIH/sida (www.aidslaw.ca) fait valoir les droits humains des personnes vivant avec le VIH ou le sida et de celles qui sont à risque ou affectées autrement, au Canada et dans le monde, à l’aide de recherches et d’analyses, d’actions en contentieux et d’autres formes de plaidoyer, d’éducation du public et de mobilisation communautaire. Nous étudions les programmes de seringues en prison depuis plus de 20 ans et faisons partie des codemandeurs dans une action en justice contre le Service correctionnel du Canada, alléguant que le fait de refuser aux détenu-es l’accès à ce service de santé porte atteinte, entre autres, à leur droit constitutionnel à la sécurité de la personne.

 

Contact

Emma Riach, agente des communications et des campagnes

Réseau juridique canadien VIH/sida

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