Depuis cinq ans, le Canada et onze autres pays ont été en négociation secrète pour le Partenariat Trans-Pacifique (PTP), souvent appelé « ALÉNA avec stéroïdes ».
Entre autres nombreuses préoccupations, des groupes du domaine de la santé ont sonné l’alerte en indiquant que l’accès à des médicaments abordables pour des millions de personnes, dans les pays en négociation, pourrait constituer un des éléments marchandés en perte – à moins que les citoyens concernés élèvent la voix. Médecins Sans Frontières a formulé la mise en garde que le PTP puisse devenir « l’accord commercial qui pourrait mettre en péril l’accès aux médicaments abordables ».
Ces craintes ont été confirmées par plusieurs fuites concernant le chapitre sur la propriété intellectuelle du PTP, qui renforcerait les droits privés des multinationales pharmaceutiques, en étendant et en prolongeant leurs monopoles de brevets sur les médicaments, aux dépens des médicaments abordables pour des millions de personnes.
Un autre chapitre réduirait la capacité du Canada et d’autres pays de prévenir des prix excessifs de médicaments, en créant plus d’occasions par lesquelles les sociétés pharmaceutiques pourraient porter atteinte à des décisions des gouvernements provinciaux et fédéral quant à la couverture des médicaments en vertu des programmes publics d’assurance santé.
Un autre chapitre, sur les « investissements », pourrait accorder aux sociétés pharmaceutiques – dans une des industries les plus lucratives au monde – des droits accrus de poursuivre des gouvernements souverains pour « interférence » à leurs « attentes » en matière de profits. De fait, le Canada est déjà aux prises avec une poursuite sans précédent de la société Eli Lilly en vertu d’un chapitre similaire dans un accord commercial en vigueur (l’ALÉNA), ce qui met en relief les dangers de l’inclusion d’autres mesures de ce genre dans le PTP.
Céder à ces types de demandes – pour lesquelles les États-Unis et des géants pharmaceutiques font pression de manière agressive – aurait les effets les plus accablants pour les personnes des pays en développement. Mais ce serait dommageable et dangereux pour les Canadiens également, en entraînant même des prix plus élevés pour les médicaments, et par conséquent des pressions accrues sur les gouvernements provinciaux et fédéral ainsi que les régimes d’assurance privée, pour refuser la couverture de médicaments dont les Canadiens ont besoin.
Compte tenu des enjeux, le Réseau juridique et de nombreux autres groupes de la société civile canadienne ont déjà demandé au gouvernement fédéral de faire preuve de transparence au sujet de ce qui est sur la table – mais sans succès jusqu’ici. (Voir la lettre et le mémoire que nous avons adressés au ministre canadien du Commerce international, Ed Fast.)
Les négociateurs du PTP se sont réunis encore, à Washington, D.C., la semaine dernière. Au même moment, le Réseau juridique canadien VIH/sida s’est joint à 47 autres organismes et experts de la société civile des quatre coins du monde, pour exhorter les ministres du Commerce international des pays en négociation à cesser les négociations secrètes en publiant à la fois l’ébauche actuelle de l’accord et les détails des positions de tous les pays dans les négociations.
Cliquez ici pour lire en anglais notre lettre ouverte aux ministres du Commerce international (envoyée le 11 décembre 2014).
Richard Elliott
Directeur générale
Réseau juridique canadien VIH/sida